L'unité matériaux et transformation (CNRS, Université de Lille, Centrale Lille et INRAE) célèbre ses 10 ans. Elle est reconnue pour sa capacité à conjuguer une recherche fondamentale du plus haut niveau et une recherche partenariale répondant à des problématiques à fort impact industriel et sociétal.

Fondée en 2010 avec l'ambition de regrouper la majeure partie des activités et compétences du CNRS, de l'Université de Lille, de Centrale Lille et d'INRAE dans le domaine de la science et de l'ingénierie des matériaux, l'UMET a célébré ce jour ses 10 ans à l'occasion d'une matinée d'échanges et de conférences autour de ses fondateurs, Jean-Marc Lefebvre, directeur de Recherche émérite de l'UMET et Alexandre Legris, directeur adjoint scientifique de l'Institut de chimie du CNRS, et de Jean-Marie Lehn, Professeur au Collège de France, Prix Nobel de chimie 1987.

« L'UMET a été créée pour fédérer les compétences complémentaires de quatre laboratoires lillois menant des travaux de recherche dans le domaine des matériaux. C'est une unité très active qui relève de quatre tutelles (CNRS, Université de Lille, Centrale Lille et INRAE) et qui regroupe actuellement plus de 200 collaborateurs répartis sur six équipes. En dix ans, cette unité a su se faire un nom, à la fois au niveau régional, national et international. Nous sommes fiers car elle est plébiscitée et reconnue pour ses travaux de pointe au service des enjeux de la société », commente Patrice Woisel, directeur de l'unité.

Cinq caractéristiques qui font aussi sa force

L'UMET fait partie de la fédération de recherche Michel-Eugène Chevreul (FR 2638), qui regroupe les unités de recherche dans le domaine Chimie et Matériaux de la région lilloise. Elle se distingue des autres laboratoires français en ingénierie des matériaux à la fois par son organisation, ses champs de recherche et sa portée.

L'unité fédère des physiciens, des géologues, des chimistes et des spécialistes du génie des procédés qui travaillent sur des interfaces uniques (géoscience, métallurgie, agroalimentaire, biologie-santé…).

L'UMET s'organise en six équipes thématiques, réparties sur deux sites (le campus de la Cité Scientifique et le site du CERTIA d'INRAE, tous deux à Villeneuve d'Ascq) : matériaux moléculaires et thérapeutiques ; matériaux terrestres et planétaires ; métallurgie physique et génie des matériaux ; ingénierie des systèmes polymères ; plasticité et processus aux interfaces ; hygiène des matériaux.

Toutes ont une activité scientifique centrée sur la science des matériaux mais leurs champs d'applications sont diversifiés : agroalimentaire, aérospatial, biologie-santé, électronique, ferroviaire, géophysique, nucléaire, pharmaceutique.

Les cœurs de métiers communs aux équipes de l'unité concernent : l'élaboration, la fonctionnalisation et la transformation sous sollicitations variées de matériaux ; la caractérisation de leurs structures et microstructures ; et l'étude des relations entre microstructures et propriétés, en relation avec les conditions d'usage.

Elle conjugue de manière équilibrée une science de découvertes du plus haut niveau et une recherche partenariale visant à répondre à des problématiques à fort impact industriel et sociétal. Ses travaux sont reconnus au niveau national comme international.

Fortement ancrée dans l'écosystème local, elle collabore avec de grands groupes internationaux, des ETI et PME ainsi qu'avec les différents pôles de compétitivité de la région Hauts-de-France.

Forte de plus de 200 collaborateurs dont plusieurs lauréats de l'ERC¹ et de l'IUF², l'UMET publie jusqu'à 180 articles scientifiques par an et dépose 2 à 5 brevets par an. Chaque année, elle forme de 30 à 40 docteurs et accueille 30 à 50 stagiaires de différents niveaux (du lycée aux masters/ingénieurs).

Des travaux à forte portée nationale et internationale

Les objectifs des travaux des différentes équipes thématiques sont variés. Ils peuvent concerner la compréhension de processus élémentaires qui conditionnent un phénomène ou un comportement donné, ou viser une application directe avec des partenaires industriels. Leur portée est souvent nationale, voire internationale.

parmi les projets menés récemment ou en cours :

-La contribution à la sûreté nucléaire par une compréhension fine de la formation des défauts se produisant dans les alliages métalliques soumis à des conditions extrêmes d'utilisation (corrosion sous contrainte, irradiation…) et pouvant conduire à une détérioration de leurs propriétés d'utilisation. L'expertise de l'UMET s'est notamment enrichie dans ce domaine par la constitution de plusieurs laboratoires communs avec les principaux acteurs de la filière nucléaire française (EDF, Framatome). Le laboratoire allie des dispositifs expérimentaux originaux ainsi que l'utilisation d'outils numériques multiphysiques et multi-échelles dans le souci constant d'améliorer leur potentiel prédictif, ceux-ci étant transférables à d'autres modes de production de l'énergie comme la fusion.

-Le développement de matériaux métalliques à hautes performances avec comme domaines d'application le transport ou l'énergie. Les nouveaux enjeux de développement durable poussent en particulier à l'allègement des structures tout en renforçant leurs propriétés mécaniques. Par conséquent, la demande pour développer de nouveaux matériaux s'est accrue ces dernières années, soit par de nouvelles voies d'élaboration (fabrication additive, …), soit en modifiant leur composition chimique (alliages à haute entropie, alliages composites…). Le laboratoire contribue à mieux comprendre les liens entre élaboration, microstructures et propriétés mis en jeu dans l'obtention de ces nouveaux matériaux.

-La mise au point de surfaces et de solutions de nettoyage pour améliorer la conception hygiénique et la durabilité des lignes de transformation agroalimentaires. L'unité a développé des techniques de fonctionnalisation de surfaces originales, basées sur le biomimétisme, pour limiter la contamination et faciliter le nettoyage (ANR Economics). Par ailleurs, en utilisant des approches de génomiques, les phénomènes d'adhésion et de structuration des biofilms en environnements agroalimentaires. En parallèle, elle a aussi mis au point des détergents innovants par nano-encapsulation d'antimicrobiens biosourcés pour une désinfection à effet rémanent des surfaces à contact alimentaire. Enfin, notons l'utilisation d'approches d'intelligence artificielle pour prédire des encrassements laitiers.

-L'élaboration de nouvelles formes physiques optimisées de matériaux d'intérêt pharmaceutique pour la conception de dispositifs médicaux innovants dans le cadre du projet Européen INTERREG 2 Mers IMODE. Ce projet coordonné par l'UMET vise à accélérer le développement de nouvelles connaissances et de nouvelles technologies basées sur les systèmes multi-composants (co-cristal/co-amorphe) afin lever des verrous technologiques pour l'utilisation de molécules thérapeutiques de très faibles solubilités. IMODE implique la collaboration de groupes universitaires et d'entreprises au niveau international menant une recherche transdisciplinaire intégrée en science des matériaux, pharmacie et médecine. Cette recherche sur les matériaux pharmaceutiques est directement associée à un volet formation par la création du master Européen BIOPHAM (BIO&PHArmaceutical Materials science) coordonné par l'UMET qui a obtenu la labellisation Erasmus Mundus en 2020. L'objectif de ce master - unique au niveau international - est de fournir une formation de très haut niveau en physique-chimie des matériaux pharmaceutiques et biopharmaceutiques. Il s'agit d'un programme de formation interdisciplinaire entièrement enseigné en anglais et bénéficiant d'un très large réseau de partenaires industriels.

Trois laboratoires communs avec des entreprises régionales

Au fil des années, l'UMET a été partie prenante dans le montage de laboratoires communs avec des entreprises de la région. Les domaines concernés sont : les biomatériaux, le recyclage, la revalorisation de matériaux et la nutrition hyperprotéinée. Ensemble, ils visent à répondre à des problématiques à fort impact industriel et sociétal.

- PYROCAT Equipe-Mixte / Etude du procédé de PYROlyse CATalytique de déchets Polymères avec Néo-Ecpo et Valorplast.

Depuis le 1^er septembre 2017, des chercheurs de l'Institut Chevreul (Laboratoires UMET et UCCS³) et des industriels de Néo-Eco (Hallennes-lez-Haubourdin) et Valorplast travaillent ensemble au sein d'une équipe mixte intitulée PYROCAT. Ensemble, ils étudient la pyrolyse catalytique de déchets de polymères en vue de permettre une valorisation matière (retour aux monomères ou à des molécules d'intérêt pour la pétrochimie) ou une valorisation dans le domaine de l'énergie (retour à un pseudo-pétrole) de ces déchets. Cette équipe s'est structurée afin de répondre avec succès à l'appel à projet EMILE (Équipes mixtes Laboratoire-Entreprise) dans le cadre du Programme Opérationnel FEDER pour le Nord-Pas de Calais 2014-2020 (édition 2017). Elle est également labellisée par le pôle de compétitivité Team2.

- Laboratoire Commun COUSUMAIN avec Cousin Biotech.

Dans le cadre de sa thématique de recherche sur les polymères pour le biomédical, l'UMET développe une collaboration avec l'entreprise Régionale COUSIN BIOTECH de Wervicq-Sud depuis 2008. L'objectif est de conférer des propriétés améliorées (activité anti-bactérienne, antalgique, etc.) aux implants textiles fabriqués chez Cousin Biotech (ligaments artificiels, brides, meshes de hernie etc.). Un financement de l'I-Site ULNE et du Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) a été obtenu suite à l'appel à projet Equipe Mixte Laboratoire Entreprise.

- Laboratoire Commun ANR Proteinolab avec Ingredia.

Proteinolab fait suite à un dépôt de projet sélectionné par l'ANR fin 2017. Issu de la collaboration entre l'UMET et la société Ingredia (Arras), ce programme de recherche conjoint vise à développer des protéines innovantes pour des matrices alimentaires et nutritionnelles hyperprotéinées à destination des sportifs, des personnes en surpoids et des malades convalescents. Ce laboratoire devrait donner naissance en 2022 à une chaire industrielle ANR.

Une forte implication dans la lutte contre la Covid-19

En 2020, l'UMET s'est impliquée dans la lutte contre la Covid-19. Elle est devenue laboratoire référent par le CNRS dans les Hauts-de-France pour produire des gels hydroalcooliques. Dans ce cadre, elle a mis en place une opération de production de gels en détournant des réacteurs d'INRAE destinés au suivi de transformations agroalimentaires. Ces hydrogels ont été distribués aux professions libérales et aux personnels soignants à domicile de la Région Hauts-de-France.

Elle s'est également illustrée en lançant ou participant à différents projets :

- Projet ANR flash Covid-19 « TELEMASQ » (textile filtrant biocide pour la conception de masques respiratoires) ;

- La mise au point et la mise sur le marché de nouveaux types de masques filtrants et décontaminants conçus avec l'unité Systèmes avancés de délivrance de principes actifs et commercialisés par Bioserenity ;

- Un dépôt d'un brevet (maturation en cours) sur un test visuel salivaire du Covid-19 rapide et très sensible.

Perspectives

« La stratégie scientifique de l'UMET continuera de s'appuyer sur le mariage gagnant-gagnant entre une recherche fondamentale permettant de générer de nouvelles connaissances scientifiques, et une recherche appliquée touchant directement la société. Nous sommes intimement convaincus que les futures grandes découvertes concernant les matériaux, et potentiellement sources d'innovation, se situent aux niveaux d'interfaces encore largement sous explorées de l'unité », commente Patrice Woisel, directeur de l'unité.

Dans ce contexte, les orientations de l'UMET viseront, entre autres, à développer des matériaux encore plus fiables et plus sûrs dans des environnements extrêmes ou complexes (exemple : nucléaire, spatial…), des dispositifs autonomes « intelligents » pour réparer l'humain, ainsi que des matériaux écoconçus et des procédés d'élaboration et/ou de transformation de matériaux encore plus « vertueux ». Ces recherches s'inscrivent parfaitement dans les domaines de recherche d'excellence de l'I-SITE ULNE, en particulier au travers des Hubs « Santé de précision » et « Planète ».

¹ L'ERC (European Research Council) finance l'excellence scientifique à la frontière des connaissances, et propose quatre types de bourses individuelles.

² L'IUF (Institut universitaire de France) compte des enseignants-chercheurs sélectionnés par un jury international pour la qualité exceptionnelle de leurs recherches, qui sont appelés membres (junior ou senior).

³ Unité de catalyse et de chimie du solide (CNRS/Université d'Artois/Université de Lille/Centrale Lille).